C’est le 26 mars 1894, voici 120 ans que le texte fondateur du Parti Ouvrier fut adopté au terme de deux jours de travaux, par les fédérations du P.O.B. réunies pour leur Xe congrès à Quaregnon. . Pourquoi Quaregnon ? En raison de l’échauffourée sanglante du 17 avril 1893, au cours de laquelle la garde civique de Mons avait tiré sur une colonne de mineurs borains qui voulaient pénétrer dans la ville, on décida, à la demande des Borains, de transférer le siège du congrès du P.O.B. de Mons à Quaregnon.
Action symbolique chez Di Rupo
Ce 26 mars, la LCR a, symboliquement, « rafraichi la mémoire » du président en titre du PS, Elio Di Rupo, par ailleurs Bourgmestre « empêché » et Premier Ministre. L’action s’est déroulée devant son domicile. Tour à tour, Christiane Maigre (militante FGTB Charleroi), Sébastien Brulez (candidat LCR sur les listes PTB-GO! à la Région), Freddy Bouchez (candidat Gauche d’Ouverture sur les listes PTB-GO! à la Région) et Céline Caudron (candidate LCR sur les listes PTB-GO! à l’Europe) ont lu des extraits de la Charte et livré leur commentaire pour y déceler le caractère très actuel du texte adopté en 1894. Freddy Mathieu a conclu en analysant le passage de la Charte qui dit « L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Rappelant les paroles de l’Internationale, écrites en juin 1871, en pleine répression de la Commune de Paris, « Il n’est pas de sauveur suprême, ni dieu, ni César, ni tribun ; prolétaires sauvons-nous nous-mêmes », il a expliqué combien notre courant est attaché à cette dimension d’autogestion de la société pour laquelle nous luttons et des luttes pour y parvenir.
Débat : Que faire de la Charte de Quaregnon ?
Dans la foulée de cette action, les participants ont rejoint les locaux de l’Université toute proche pour assister à un débat auquel la LCR avait invité divers intervenants, dont des représentants des différentes composantes de PTB-GO!.
En tant qu’historien, François D’Agostino (PC), replaça l’adoption de la Charte dans le contexte de l’époque : les premières crises du système capitaliste, les débuts tâtonnants des organisations politiques de la classe ouvrière. Notre camarade Céline Caudron (candidate à l’Europe), elle aussi historienne, s’est attachée à montrer les mérites et les limites de la Charte, en particulier à la lumière des combats d’aujourd’hui. La Charte c’est une « boussole » qui nous indique vers ou on veut aller. Mais elle pointa la difficulté de faire le lien entre les actions quotidiennes –aujourd’hui souvent défensives d’ailleurs– et le combat pour changer la société. C’est ce que notre courant appelle « un programme de transition ».
La Députée bruxelloise Sfia Bouarfa –elle insiste ironiquement sur cette nouvelle appellation– a passé rapidement en revue sa vie, de la naissance au Maroc dans une région minière, exploitée par les colonialistes français, à l’engagement politique, au PS, à Schaerbeek contre Nols et consorts. Dans ses combats, Sfia nous dit qu’elle s’est toujours appuyée sur la Charte de Quaregnon qui symbolisait l’espoir d’un monde meilleur. Elle n’est pas tendre avec les leaders du PS et explique ce qui se passe dans les coulisses de ce parti qui a rompu avec les valeurs de la Charte. « J’aurais pu me taire et laisser courir tranquillement mon mandat jusqu’à son terme en mai et ensuite me retirer, mais l’appel de soutien à PTB-GO! m’a redonné de l’espoir. Et j’espère que cette unité va continuer, car les gens ont besoin d’une alternative » conclut-elle.
Ce fut ensuite Jean-François Tamellini, Secrétaire Fédéral de la FGTB. Celui-ci a précisé d’entrée de jeu qu’il n’était inféodé à aucun parti et que, comme syndicaliste, il tenait jalousement à l’indépendance syndicale. Il a mis la déclaration de principes de la FGTB, le programme des réformes de structures des congrès de 1954 et 56 de la FGTB, et la Charte de Quaregnon en parallèle, pour monter toute l’actualité de ces textes. « Oui, dit-il, le monde est toujours divisé entre exploités et exploiteurs, plus que jamais d’ailleurs ». Il plaide alors pour que le mouvement syndical et la gauche politique « retrouvent des couleurs » et du punch dans leurs actions. Il plaide notamment pour renouer avec les grèves générales et les occupations d’entreprises. Il se félicite des premiers pas qui ont été faits vers la construction d’une alternative de gauche par la constitution des listes PTB-GO!. « Cela ne divise pas la gauche, ça la renforce » a-t-il conclut.
Enfin c’est Marco Van Hees (PTB) qui concluait le tour de table. Par quatre extraits de la Charte il a décrit la déclinaison actuelle de revendications anticapitalistes, en particulier dans le programme du PTB.
Avant de passer la parole à la salle, Pierre Gillis (Amis du Monde Diplomatique) qui présidait la séance, a appelé Marwa Mahubb, réfugiée de guerre Afghane, militante du Collectif des Afghans du Béguinage, à prendre la parole. Marwa nous a expliqué son long combat « pas pour moi, pour mes enfants » pour faire reconnaître ses droits ici. « On nous accuse d’importer la guerre d’Afghanistan dans votre pays, c’est faux ! Nous voulons vivre dignement ». Elle explique comment, les sans papiers, doivent accepter de travailler en noir –ou dans les centres qui les accueillent, pour 3€– pour survivre. « Moi je préférerais travailler dans la légalité et payer des taxes pour la Belgique ». Elle a expliqué les différentes démarches entamées par les réfugiés afghans, notamment la rencontre avec Di Rupo et De block qui a suivi leur marche vers Mons en décembre 2013. « On ne veut pas nous donner des réponses collectives et on nous renvoie vers l’Office des étrangers et le CGRA pour prendre les dossiers au compte-goutte, individuellement et tenter de nous épuiser et diviser ». Elle a remercié les militants montois pour l’accueil de la marche et pour cette invitation.
La salle a la parole
Marwa a été chaleureusement applaudie par la salle. Le débat était lancé. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’une question importante vienne sur le tapis. Des responsables et des militants syndicaux ont interpellés les représentants des 3 organisations sur l’après-élection : « qu’attendez-vous pour unir vos forces ? » Plusieurs militants du PTB se sont aussi réjouit du climat positif de ces premiers pas en commun dans la campagne et souhaité que certains tabous tombent. « Il faut se parler, il faut agir ensemble ». La problématique des Banques (« il faut nationaliser »), « la lutte des classes, c’est pas dépassé ? », « comment briser l’hégémonie social-démocrate sur la classe ouvrière ? », furent les principaux thèmes des 2 tours de parole. Un débat, intéressant et respectueux, auquel la tribune ne s’est pas dérobée.
–Correspondant LCR