à la veille de la présentation de ses réquisitions, Nisman a été retrouvé « suicidé ». Il n’y a aucune preuve qu’il se soit lui-même tiré le coup de feu. Un témoin de l’intervention de la brigade criminelle a déclaré qu’une trentaine de policiers avait fait irruption dans l’appartement du procureur, y mettant tout sens dessus-dessous et détruisant des preuves.
Tout cela se produit sur fond de lutte ouverte entre les services de renseignement (SIDE), où rien n’a changé depuis la dictature, et le gouvernement. Selon la SIDE, c’est le gouvernement iranien qui a organisé l’attentat de l’AMIA, et Cristina Kirchner était intervenue auprès d’Interpol pour dédouaner ses auteurs en échange d’une série d’accords commerciaux avec l’Iran, accords qui ont finalement fait naufrage. Le 26 janvier, la présidente ordonnait la dissolution de la SIDE.
Ce mercredi 18 février, des manifestations étaient organisées dans les principales villes du pays à l’appel d’un groupe de procureurs opposés au gouvernement. Des dizaines voire des centaines de milliers de personnes, provenant essentiellement de la classe moyenne anti-kirchnériste, y ont pris part, pour réclamer justice mais aussi pour dire qu’elles en avaient assez des restrictions mises aux achats de dollars et aux voyages à l’étranger, ainsi que de l’insécurité.
Les travailleurs et les classes populaires ont regardé tout cela de l’extérieur. Pour eux, les vrais problèmes sont la dégradation de leur niveau de vie, la hausse du chômage, l’impôt sur les salaires et l’inflation.
Une fin de règne laborieuse
La mort de Nisman a déclenché une énorme crise politique qui accentue le climat de fin de règne présent depuis déjà un certain temps. Un moyen de répondre à cette crise sur le court terme serait d’accepter la demande d’un groupes de personnalités, consistant à mettre en place une commission d’enquête indépendante sur les événements de l’AMIA et la mort du procureur Nisman. Une procédure similaire à ce qui s’était fait pour les crimes de la dictature militaire.
Mais à plus long terme, les perspectives restent sombres pour le gouvernement. Les huit mois qui nous séparent des prochaines élections générales seront très difficiles pour lui. Les procédures judiciaires s’accumulent contre la présidente, des membres de sa famille et des représentants du gouvernement. Le pays fait face à une grave crise économique et sociale, alors que ceux qui apparaissent « présidentiables » ne proposent rien de nouveau.
La fin de cycle du kirchnérisme correspond à celle du modèle « progressiste » au niveau de toute l’Amérique latine. Les gouvernements du Brésil, du Venezuela et de l’Équateur, sont confrontés aux mêmes problèmes que Cristina Kirchner, la seule exception est la Bolivie. La décennie d’abondance, avec ses hauts prix du pétrole et autres matières premières qui ont facilité la fuite en avant, est terminée. Cela met à nu la réalité de la corruption et l’inexistence de tout plan et de toute réflexion économique à moyen et long terme.