L’attaque scandaleuse contre le bus transportant des joueurs de football de Dortmund serait terroriste si elle était le fait de l’Etat Islamique. Très étrangement, elle ne l’est plus quand elle est le fait d’un bon Allemand, un « Doitsche » ingénieur civil en électronique.
L’entrepreneur, certes trop zélé, jouait en Bourse par le biais d’un crédit bancaire avec lequel il achetait des instruments d’investissement spéculatifs, des options put, en actions du club de football de Dortmund. Il aurait pu gagner €4.000.000 dans l’opération. Le terroriste s’est transformé subitement en un entrepreneur trop zélé.
Cela mais une lumière crue sur deux aspects de l’actualité ordinaire. Certains entrepreneurs d’aujourd’hui sont prêts à tuer pour engranger des millions. D’ordinaire, ces pertes de vie, ou d’années de vie en bonne santé, sont causées par des négligences coupables patronales, des prises de risque avec la santé et la vie des travailleurs et des consommateurs qui augmentent les bénéfices. Ainsi, les grands actionnaires d’EDF/Luminus ou d’Engie/Electrabel votent en CA la continuation de réacteurs caducs. Ainsi, le groupe Eternit a continué à produire des produits cancérigènes en sachant qu’elles peuvent causer des cancers graves à celles et ceux qui en respirent les poussières. L’entrepreneur poseur de bombes est trop zélé parce qu’il blesse des personnes avec l’intention indéniable de blesser ou tuer. Nous entrons en plein dans la morale chrétienne : un acte n’est plus jugé sur base des suites qu’il a provoquées, mais sur base du mobile du sujet. La négligence coupable des riches devient innocente, l’acte « méchant » d’un travailleur qui lève la main sur son patron commet un crime impardonnable.
L’autre éclaircissement concerne la guerre des mots qui se joue dans les médias. Est terroriste, celui qui est radicalisé. Radicalisé ? Un nouveau terme fourre-tout, comme populisme, qui permet de diviser les opinions non en gauche contre droite, opinions du travail contre opinions patronale, mais en idées du « main stream », la pensée patronale servie à la sauce raisonnable », opposées aux « pensées marginales », où les idées du monde du travail sont allègrement logées dans le même registre que les débilités fascistes, fondamentalistes ou islamophobes. Il s’agit d’un faux, dans le sens littéral du terme. Le mot « radical » indique un lien avec la racine d’une chose, d’une plante, d’un mot, d’une idée. L’islamisme, le conservatisme chrétien ou le programme du Front National passent à côté de la racine des injustices et des inégalités dans notre société, en y opposant des dichotomies croyant/non-croyant, autochtone/immigré récent.
En attendant, le réfugié Irakien, qui a été arrêté à grand renfort de publicité comme « le musulman qui attaque notre football » reste en prison. Puisqu’il n’a pas posé les bombes, on lui a trouvé une autre culpabilité. L’intention de commettre un attentat, sans doute ? Sensationnalisme et racisme font décidément bon ménage.