Donald Trump a attiré les votes des républicains grâce à ses attaques sur les immigré·e·s et sur les femmes, prétendant que son succès en tant que businessman ferait de lui un excellent manager de l’économie américaine. Il traite les immigrés mexicains de «tueurs» et de «violeurs» et appelle à la construction d’une grande barrière à la frontière USA/Mexique.
Trump est en tête de la douzaine de candidat·e·s républicains, mais les dirigeant·e·s du parti s’inquiètent que son discours ne puisse gagner le vote des modéré·e·s et des indépendant·e·s lors des présidentielles.
A l’opposé, la campagne de Bernie Sanders au parti démocrate pour la candidature présidentielle continue de gagner le soutien de millions de citoyen·ne·s, de la classe moyenne à la classe ouvrière en passant par les étudiant·e·s. Sanders a rallié d’immenses foules à travers le pays en août et septembre : Minneapolis, Denver, Madison, Phoenix, Council Bluffs, Seattle (12 000), Portland (20 000), Los Angeles (27 000) et également en Caroline du Sud et en Virginie. En juillet déjà, sa campagne levait 15 millions de dollars avec des contributions individuelles moyennes de 31,20 $. Sanders a récemment tenu une conférence avec 26 000 membres de syndicats d’ouvriers·ères dont 1350 étaient prêts à soutenir activement sa campagne.
Pourquoi Sanders, sénateur indépendant de longue date, est-il soudainement si populaire ? Sanders s’est saisi des problèmes dénoncés par le mouvementOccupy Wall Street, les inégalités économiques et le rôle de l’argent en politique. Il appelle à un salaire minimum de 15 $ de l’heure, des soins gratuits pour tou·te·s et une éducation universitaire gratuite. Il appelle également à des actions radicales en faveur du climat, dont l’abandon des énergies fossiles, et étant fils d’immigrés, il défend une politique migratoire juste et humaine. En Iowa et dans le New Hampshire il devance déjà Hilary Clinton.
Programme «social-démocrate» et appel à une révolution contre les milliardaires
Sanders se déclare lui-même un social-démocrate dans la tradition scandinave : soins et éducation gratuite pour tous ; bon travail et bon salaire avec une excellente assurance chômage, programme de logements public ainsi qu’une conception généreuse du bien publique et du bien-être social. Ce programme « social-démocrate » représente un développement important dans la politique étasunienne, mais plus important encore est l’appel de Bernie à une « révolution politique » contre la « classe milliardaire ».
Cette révolution se définit surtout par la reconstruction des syndicats ouvriers, des droits civils et du black movement. Sanders a souvent répété que les changements politiques et juridiques sont dus aux mobilisations sociales et aux organisations ouvrières.
Le pape François, quant à lui, en Amérique a apporté plus ou moins le même message que Sanders au Congrès et aux Etasunien·ne·s : ils·elles doivent agir face aux changements climatiques, accueillir les migrant·e·s, augmenter les salaires et le niveau de vie, diminuer la pauvreté et mettre fin au problème des sans-abris.
Les Européen·ne·s, en particulier à gauche, ne se rendent probablement pas compte de l’importance de la religion aux USA. Eglises, synagogues et mosquées sont partout et les croyant·e·s ont un rôle important dans la société et dans la gauche en général. Le catholicisme est l’une des religions les plus importantes en Amérique.
Bien que les Etats-Unis aient été fondés par des protestant·e·s, les plus grands groupes d’immigré·e·s qui se s’y sont établis durant les 140 dernières années étaient catholiques : Irlandais·e·, Allemand·e·s, Polonais·e·s, Italien·ne·s et plus récemment les Latino-américain·e·s. Malgré le recul de l’église et de la religion aux Etats-Unis, et bien que les églises évangéliques aient gagné de nombreux convertis du catholicisme, l’église catholique reste une puissance importante dans la société étasunienne.
L’Eglise catholique comme facteur de légitimation de luttes sociales
De nombreux meneurs·euses et activistes dans le mouvement pour le droit des immigré·e·s, les communautés de travailleurs·euses et les syndicats ouvriers sont catholiques. Particulièrement dans le mouvement pour le droit des immigré·e·s et les communautés de travailleurs, l’enseignement social catholique joue un rôle important pour justifier les activités de ces mouvements, leurs luttes sociales et leurs actes de désobéissance civile éventuels. Tout comme le social gospel protestant avait fourni une justification idéologique à la réforme sociale et à la lutte pour les droits des ouvriers·ères, les enseignements catholiques ont été utilisés pour justifier l’organisation de syndicats, les grèves pour de meilleurs salaires et la demande d’une amélioration des programmes sociaux.
Actuellement, l’encyclique du pape François, Laudato Si’ (2015), un livre de 184 pages principalement tourné vers les problèmes écologiques, fournit un puissant outil entre les mains des activistes en faveur de l’environnement. Le pape décrit la crise environnementale contemporaine et pointe son origine dans le capitalisme, l’industrie de la société moderne et le consumérisme. François appel à un changement de la politique et du mode de vie, préconisant une harmonie entre l’humanité et l’environnement. Le message du pape donnera une plus grande légitimité aux immigré·e·s, aux ouvriers·ères et aux mouvements en faveur de l’environnement en Amérique.
Ainsi, la campagne de Sanders, juif socialiste, et la visite aux USA du pape catholique François ont été récemment les événements les plus importants pour la gauche américaine.
Source : solidaritéS