traduction de l’anglais d’un article de Mélanines paru le 08.12.2016
Aujourd’hui 8 décembre 2016, à la télé française, au cours d’une émission inculte sur une chaîne inculte, un animateur blanc s’est payé une tête de nègre en faisant du blackface. L’animateur en question, Andreas Kastrinos, était alors si fier de lui qu’il a décidé de laisser l’émission poster l’hilarant gag sur Twitter. Il fut acclamé. Tout le monde se fendit la poire. Ou presque.
La communauté afropéenne de Twitter n’a pas trouvé la plaisanterie à son goût. Non, parce que bon, ras-le-bal de voir des Blancs se bidonner sur le dos des Noirs.
Le tout sans aucune retombée pour eux, mais de lourdes conséquences pour nous : la quintessence du privilège blanc quoi.
La chaîne responsable, NRJ12, n’a fait aucune déclaration concernant l’incident. J’imagine que ce n’est même pas au programme. L’émission Mad Mag, qui est le meilleur programme de désinformation que j’ai jamais vu (non pas que j’aie déjà visionné cette bouse avant aujourd’hui) a également gardé le silence.
En Europe et partout ailleurs dans le monde, les Noirs se battent pour avoir une chance d’être un jour pris au sérieux, et passent parfois des heures à lisser/détruire leur belle chevelure avant de passer un entretien, sous prétexte qu’ « on n’embauche pas des gens coiffés comme des dessous de bras ». Mes grands-mères, mes tantines, mes sœurs, toutes utilisent de la crème à base d’acide et de soude pour blanchir leur peau sacrée mais secrètement haïe.
Pendant ce temps, en juin dernier, un autre animateur ignare (Loris Giuliano) nous livre une danse grotesque du nom de « Fatoumata », affublé d’un lamentable blackface, les lèvres rouges pointées en cul de poule à la manière d’un gorille, mimique censée évoquer les lèvres africaines. C’est donc la face peinte en noir, avec des ballons de baudruche sous un boubou en pagne supposés représenter le gros cul et les énormes nichons des mamas africaines, que l’artiste nous livre l’image consternante que certains colons ont de la femme noire.
L’émission a battu les records d’audience ce soir-là.
La mise en scène humiliante a fait le tour des réseaux sociaux. Ça a bien buzzé. On s’est bien marrés.
Et ça a ouvert une brèche : de nombreuses soirées blackface ont suivi (cf Blackface a Edhec, blackface de l’Université de Saint-Louis Bruxelles, et aujourd’hui sur NRJ12).
Suite au déplorable événement « Fatoumata », le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel français aurait reçu plus de 250 plaintes. Mais qu’à cela ne tienne, ils persistèrent dans leur racisme institutionnel et déclarèrent que la séquence « n’avait pas pour but de discriminer un groupe de personnes à raison de leur origine ».
D’accord, France. D’accord, police de France : continuez à tuer des Noirs comme Adama Traoré. D’accord, institutions françaises : continuez à discriminer les gens au faciès. D’accord, médias français : continuez vos bouffoneries et vos blackfaces.
J’ai hâte de voir combien de temps vous tiendrez, car on ne lâchera jamais. Pas avant que le blackface soit considéré comme une humiliation raciale, en tous cas. Ah et qu’il soit puni comme tout acte raciste.
La peau noire n’est pas un déguisement. Nous sommes une culture, pas un costume.
Ceci est non-négociable.
PS : portez plainte au CSA contre Andreas Kastrinos, le Mad Mag et NRJ12 !
Source : Mélanines