Dans la nuit du 9 au 10 juin 2014, les travailleurs du métro de São Paulo ont décidé de suspendre la grève. La réunion a commencé à 13h. Elle fut interrompue pour permettre une réunion de négociation entre le syndicat des travailleurs du métro, le président de la société, le secrétaire des transports urbains de l’Etat de São Paulo et un représentant du gouvernement.
Altino Prazeres, président du syndicat, avant de se rendre à la réunion, a insisté, en assemblée, sur l’importance d’obtenir la révocation des 42 licenciements décidés par l’Etat de São Paulo. Ces licenciements ont été envoyés par télégramme et frappent aussi bien des travailleurs que des responsables syndicaux et, y compris, des membres de la commission paritaire (CIPA) de la firme. Une telle décision illustre à la fois l’enjeu politique national posé par cette grève et la brutalité avec laquelle les différents pouvoirs cherchent à briser le mouvement syndical qui n’est pas coopté par les pouvoirs étatiques et le pouvoir fédéral.
L’assemblée des travailleurs a décidé de suspendre la grève jusqu’au 11 juin. A 18h30 ce jour-là doit se tenir une nouvelle assemblée. La réintégration ou non des 42 licenciés sera au centre de la décision que prendra l’assemblée. Dans un tel conflit s’expriment différentes opinions. Altino Prazeres a déclaré (Folha de S.Paulo du 10 juin): «Les travailleurs ont accepté de retourner au travail pour démontrer leur disposition à négocier. J’espère que le gouvernement va négocier.» Il a ajouté que si l’augmentation salariale accordée (8,7%) – en fait une adaptation à l’augmentation des pris – n’était pas celle qu’attendaient les travailleurs, la revendication dorénavant centrale était l’annulation des licenciements. Le gouverneur Geraldo Alckmin a déclaré qu’il n’y avait pas de raison de revenir sur les licenciements car les travailleurs du métro n’étaient pas licenciés parce qu’ils avaient fait grève – bien que celle-ci ait été considérée comme illégale –, mais parce que d’autres accusations pesaient sur eux. Il n’a pas précisé mais, selon la presse, l’intention du gouvernement est d’accuser les grévistes de dommages divers commis en lien avec la grève et d’«indisciplines». Une criminalisation classique d’une grève par ce type de pouvoir. Ces accusations prennent en compte des allégations de la Police militaire (organisme de répression qui dépend des gouverneurs). La Police militaire dit disposer d’un dossier prouvant que des grévistes ont empêché des travailleurs non grévistes de reprendre leur service.
Cette grève s’inscrit dans un contexte où Dilma Rousseff, la présidente du Brésil, membre du Parti des travailleurs, fait la promesse aux habitants délogés des favelas qui se sont regroupés auprès du stade Arena Corinthians de leur trouver des «logements sociaux». Promesses et répression se marient dans la gestion d’un ordre où collaborent tous ceux qui veulent être les vrais gagnants – en termes d’appropriation de capital – d’une Coupe du monde de football qui semble, selon certains médias, être au centre des préoccupations de plus d’un milliard de personnes. Ce milliard est-il pris en otage par les quelques milliers de grévistes du métro de São Paulo, par le Mouvement des travailleurs sans toit? Poser la question c’est y répondre.
Source : A l’encontre