Deux jours à peine après l’installation du nouveau gouvernement, la capitale Ouagadougou était ensanglantée par un attentat perpétré par trois jeunes du groupe al-Mourabitoune, que dirige Mokhtar Belmokhtar, affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Trente personnes de plusieurs nationalités ont été assassinées.
Du temps de Blaise Compaoré, le Burkina Faso était une base arrière pour de nombreux groupes rebelles religieux ou non du Mali. à tel point que lors de l’insurrection populaire qui l’a renversé, les troupes des Nations unies ont dû en catastrophe exfiltrer plus d’une dizaine de ces dirigeants qui possédaient de confortables villas dans le quartier huppé de la capitale. Le pouvoir de l’époque entretenait des relations étroites avec les différentes factions armées, y compris djihadistes, ce qui permettait à Compaoré d’être un élément clef dans la région et le passage obligé pour la libération de nombreux otages détenus par AQMI. Ainsi, le pays était préservé des violences djihadistes qui faisaient rage dans les autres pays sahéliens.
Depuis la chute du pouvoir, le Burkina Faso fait face à une violence accrue. En effet, des attaques ont été signalées contre des postes de gendarmerie à Samorogouan et Oursi, sur le site minier de Tambao où un Roumain a été kidnappé, enlèvement également de deux Australiens à Baraboulé. Le jour même de l’attentat, une patrouille de l’armée tombait dans un guet-apens à Gorom Gorom, faisant deux morts et deux blessés.
Volonté de déstabilisation
Difficile de ne pas voir un lien entre ces événements et la chute du pouvoir. Soit le pays est devenu une cible parce qu’il a perdu son rôle de refuge, soit les éléments les plus radicaux du clan Compaoré ne sont pas étrangers à ces attaques.
Cette dernière hypothèse reste plausible, d’autant que la tentative armée de la fin décembre 2015 pour libérer Djibrill Bassolé et Diendéré – emprisonnés pour avoir soutenu le putsch du Régiment de sécurité présidentiel (RSP) contre le gouvernement de transition – a clairement révélé la capacité de nuisance des nostalgiques de l’ancien pouvoir. Ce que révèlent aussi les fuites des écoutes téléphoniques entre Bassolé et Soro, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire qui prévoyait des actions armées en soutien au coup d’État du RSP.
Au côté de Blaise Compaoré qui a été exfiltré vers la Côte d’Ivoire par les troupes françaises du Commandement des opérations spéciales (COS), se trouvent les hommes de son clan, comme le Mauritanien Mustapha Chari, un proche de Mokhtar Belmokhtar. Des officiers parmi les plus ultras du RSP se sont aussi réfugiés dans l’ouest de la Côte d’Ivoire et restent une menace potentielle pour le nouveau gouvernement du Burkina Faso.
Entre un islam radical soutenu par les pays du Golfe, en l’occurrence le Qatar pour le Burkina Faso, des élites corrompues qui entretiennent de liens étroits avec les réseaux criminels et djihadistes, des services de sécurité peu efficaces car essentiellement tournés contre les opposants, et une jeunesse sans avenir, les pays africains restent une cible de choix pour les djihadistes.
Source : NPA