Ce 20 janvier, Donald Trump sera le nouveau Président des Etats-Unis. «Bonne année», qu’ils disaient! Comme entrée en matière pour 2017, nous voilà servi.e.s. Un homme raciste, misogyne et encensé par l’extrême droite de New-York à Paris (de la alt-right aux Etats-Unis à Marine Le Pen en France) se retrouve à la tête de la première puissance économique et militaire de la planète.
Le cabinet qui l’entoure est un véritable cabinet des horreurs: le Secrétaire d’État Rex Tillerson, PDG du géant prétrolier ExxonMobil et décoré par la Russie ; le Secrétaire au Trésor Steven Mnuchin, ex de Goldman Sachs qui s’est enrichi avec la crise des subprimes ; le secrétaire d’État à la Défense James Mattis qui a dirigé l’invasion de l’Irak en 2003 ; le Secrétaire d’État à la Sécurité intérieure John Kelly, ex boss de Guantanamo ; ou encore le Secrétaire d’État en charge de l’Environnement Scott Pruitt qui a déclaré: «Le réchauffement climatique est un canular entretenu par la Chine pour affaiblir l’économie américaine».
Nous ne pourrions passer en revue ici les chamboulements que cette équipe Trump risque d’amener en politique internationale. Citons simplement la promesse de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël et d’y déplacer l’ambassade des États-Unis (aujourd’hui à Tel-Aviv). Ceux et celles qui auraient pu voir en ce magnat de l’immobilier un possible candidat «anti-establishment» en ont pour leurs frais. Trump, lui, en est convaincu: son équipe est «un des meilleurs cabinets jamais créés dans l’histoire de notre nation», comme le rapporte la Radio Télévision Suisse RTS.
Passés les étonnements des éditocrates de la presse dominante étasunienne et européenne, le business as usual reprend ses droits: «Comment profiter de l’effet Trump en bourse?», tirait récemment un supplément du quotidien de la classe dirigeante belge, l’Echo.
Ne pas pleurer, s’organiser!
Il ne sert à rien ici de revenir sur les «si» (si Bernie Sanders l’avait emporté face à Hillary Clinton, etc.). La «chose» est là, et il faudra la combattre les quatre prochaines années! En dialectiques que nous sommes, nous ne pouvons nous empêcher de voir, même dans la situation la plus sombre, les possibilités d’une renaissance des luttes. La preuve en est: à l’heure d’écrire ces lignes, des manifestations sont annoncées dans plusieurs villes des Etats-Unis et du monde (dont Bruxelles), pour le vendredi 20 janvier, date d’entrée en fonction du nouveau præsidens horribilis. L’initiative #DisruptJ20 («perturber le 20 janvier») appelle à se mobiliser «en rejet à toutes les formes de domination et d’oppression». D’autres avaient repris, dès le lendemain de l’élection, la consigne «Don’t cry, organise!» («Ne pleurez pas, organisez-vous!).
- Trump est le nouveau poulain de l’establishment radicalisé. Mais il a aussi bénéficié de l’abstention des exclu.e.s du système, notamment de la Rust Belt (la «ceinture de rouille», ces états désindustrialisés du nord des USA) qui ne voyaient pas, à raison, Hillary Clinton comme une alternative. Regagner les laissé.e.s pour compte de la globalisation à un projet émancipateur, voilà une bataille à mener pour la gauche étasunienne. Mais aussi pour les gauches européennes, afin d’éviter l’arrivée au pouvoir de petits Trumps et Trumpettes. Notamment en France, où l’on risque de se retrouver en fin d’année avec un match Fillon-Le Pen au deuxième tour de l’élection présidentielle.
Pendant ce temps, les chiffres présentés récemment par Oxfam montrent que les richesses continuent à se concentrer d’avantage: Huit milliardaires détiennent autant que 3,6 milliards de personnes sur cette planète. L’année dernière, l’ONG évoquait le chiffre de 62 personnes qui concentraient autant de richesses que la moitié de l’humanité. Les inégalités se radicalisent, le capitalisme aussi. Le monde risque de ne plus être le même à partir de ce 20 janvier. L’heure n’est pas aux lamentations, mais à l’organisation d’une force révolutionnaire capable faire voler en éclat l’ordre criminel des choses!
Édito paru dans La Gauche #80, janvier-février 2017.