La semaine passée, le journal Handelsblatt publiait une info confirmant ce qu’on sait de l’aide à « nos amis grecs », selon l’expression tartufienne en vigueur à la troïka : sur les 220 milliards « accordés », seuls 9,7 milliards sont allés dans le budget grec, le gros des sommes restantes servant à payer les intérêts, la recapitalisation des banques…
La publication de ces chiffres précis aurait pu être un levier pour un refus massif des nouvelles mesures qui ont été adoptées ce dimanche, avec un gouvernement Syriza-Anel prouvant – si besoin était – son respect de la logique libérale au détriment de la population.
Car, contrairement à ce qu’indiquent des journaux français, ce ne seront pas les plus riches qui seront touchés : les milieux populaires seront encore plus pauvres. Pour obtenir un nouveau versement de l’aide, il s’agissait de parvenir à « économiser » 5,4 milliards d’euros, comme exigé par la troïka. Et cela sur trois secteurs… D’abord les retraites, les pensions déjà fort diminuées (plus de 50 % en 5 ans) baissant encore. Puis les impôts directs : le taux non imposable passe de revenus de 9 500 à 8 700 euros annuels, et la tranche des revenus 10 000 à 28 000 euros annuels voit ses impôts augmenter (+ 200 euros pour les revenus autour de 10 000 euros !), celle allant jusqu’à 41 000 baissant, pour remonter pour les tranches suivantes. Enfin les impôts indirects vont frapper eux aussi : hausse de la TVA de 23 à 24 %, taxes diverses sur la télévision et internet, l’énergie, cigarettes et alcools.
L’art et la manière…
Et non content d’imposer de telles mesures comparables en tout point à celles du Pasok et de la droite, le gouvernement a ajouté la manière : profiter du week-end du 8 mai, avec report à cette date des manifs du 1er Mai qui tombait cette année le jour de Pâques. Double objectif : éviter une grosse mobilisation en semaine, et faire adopter ces mesures pour montrer dès ce lundi 9 mai à Bruxelles à quel point il respecte les règles du jeu ! Avec en prime des pressions tactiques : parier sur le « gentil » Juncker qui explique que Tsipras fait bien le travail auquel il s’est engagé l’été dernier en trahissant le Non du référendum grec, contre les « méchants » FMI et Schaüble. Comme si tous n’étaient pas d’accord sur le fond : quand Juncker dit qu’on va pouvoir parler de la question de la dette, c’est non pas pour la réduire… mais pour envisager l’étalement de son remboursement !
Alors, bien sûr, il y a eu des mobilisations, mais celles-ci étaient rendues difficiles par la soudaineté du vote de ces mesures, mais surtout à cause du découragement qui pèse sur le mouvement de résistance, avec des engagements électoraux balayés par Tsipras.
Mais l’un des facteurs qui bloque de possibles grosses mobilisations, c’est l’absence d’unité dans la rue : pour couvrir les différents cortèges du « 1er Mai » (le 8 mai donc !), il fallait de bonnes jambes, entre le gros cortège du PC (KKE / PAME), celui de GSEE et quelques secteurs du privé, celui d’Unité populaire, battu en nombre par celui des maoïstes (KKEML et MLKKE !), ou celui d’une partie d’Antarsya, l’autre partie veillant – avec succès – avec les syndicats de base dans le centre d’Athènes à la non-ouverture des magasins le dimanche…
Alors, oui, il y avait des milliers de travailleurEs, de jeunes, de retraitéEs ces 3 jours à Athènes, la grève de 48 heures s’est faite sentir dans quelques secteurs, mais ce qui doit être recherché plus que jamais, c’est un élan unitaire qui seul permettra de mobiliser massivement, pour des victoires indispensables.
D’Athènes, A. Sartzekis
source: NPA