Dans les quelques jours qui ont suivi les attentats de Bruxelles la bourse est devenue le lieu symbolique où s’exprimaient les craintes, les espoirs, le refus de la terreur, l’envie de vivre.
Il ne se passe pas un jour sans une présence massive de centaines de citoyens de toutes origines.
La bourse devient le symbole de la richesse multiculturelle de Bruxelles. Il y est né une conscience collective, une conviction que ce n’est qu’ensemble qu’on peut changer les choses.
Ca gêne…
Au cours des huit derniers jours, on a assisté en trois phases à une véritable reprise en main de ce magnifique brassage d’idées par les « autorités ».
Il y eut tout d’abord ce dimanche de Pâques noirci par ces hordes de hooligans, manipulés et guidés par l’extrême-droite, amenés à bon port jusqu’à la Bourse par la police de Bruxelles. Le noir devait venir ternir ces rassemblements colorés.
Ensuite, la ville a entrepris une vaste campagne de publicité/propagande à la télé pour redorer son image. Empruntant au passage les images, les petites phrases, les bons mots, de tous ceux qui se sont exprimés sur les marches de la Bourse. Deuxième étape : dans un souci, louable a priori, de conserver une trace de ces différentes manifestations, on a commencé sur les lieux un vaste archivage sous forme de photos, de prélèvement d’éléments écrits sur des cartons…
Une étape importante évidemment, car du coup, tout ce qui s’était exprimé collectivement passait potentiellement au rayon des souvenirs, de la lumière printanière à l’obscurité des archives de la ville.
Vandersmissen super-flic
Une semaine plus tard ce lent travail de sape a été parachevé par l’intervention musclée de la police pour éliminer de la place de la Bourse tous ceux qui ont animé les discussions, les prises de conscience, la volonté d’agir, de tous ceux qui s’y sont exprimés. Le prétexte : une interdiction de manifester sur tout le territoire de Bruxelles prise par le bourgmestre Mayeur et le ministre-président Vervoort, suite à l’intention de groupuscules nazis de manifester à Molenbeek.
Mais faisons les comptes, la répression s’est très peu abattue sur ces nervis qui ont pu manifester avec des banderoles à Molenbeek, a Dilbeek et même sous l’Atomium. Pendant ce temps-là, ce sont les pacifistes, les antiracistes, les antifascistes, les syndicalistes qui se faisaient tabasser et emmener au poste. Et à Molenbeek ce sont les jeunes des quartiers qui ont été repoussés par les autopompes.
Voilà, le tableau s’achève. D’une zone de création et d’expression collectives, la Bourse se transforme en un lieu de spectacle. Les touristes japonais, américains, les curieux de toutes sortes, pourront y faire des selfies en se disant « à quelques semaines près, on aurait pu y rester dans ces attentats ».
Vous rêviez d’être acteur de votre vie, vous voici transformé en spectateur d’une nouvelle attraction bruxelloise, comme Manneken-Pis ou l’Atomium.