En France l’élite rangée autour d’Emmanuel Macron a gagné une bataille. L’avenir nous apprendra s’il s’agit d’une victoire à la Pyrrhus. Marine Le Pen, la perdante, a quand même ramassé 10 millions de voix. Ce n’est pas rien. Le beau monde européen lâche pourtant un soupir de soulagement : le fascisme ne passera pas et l’Europe néolibérale est sauvée.
Les vrais problèmes ne viennent pourtant que de commencer. La droite traditionnelle est en désarroi, le social-libéralisme se dissout, Mélanchon a subi un nouvel échec électoral et le Parti communiste se cache dans les coulisses. Si l’Europe continue sa politique néolibérale, une politique malheureusement acceptée par ce qui reste de la gauche rose, elle continuera à frayer le chemin pour la droite populiste et son aile extrémiste. Car c’est quoi ce miracle qui porte le nom Macron ? Un politicien qui prétend être ni de gauche ni de droite, donc une sorte de bonapartiste, une figure de droite qui prétend se situer au-dessus des classes sociales antagonistes. Le Monde Diplomatique, un mensuel qu’on peut difficilement ranger sous le drapeau rouge du sang de l’ouvrier, a consacré une page entière à ce personnage, sorti du monde financier, sous le titre « Emmanuel Macron, fabriqué pour servir – Le candidat des médias ». Le Monde, Orange, Meetic, SRM, Le 1, Pink TV, Radio France, Challenges, SFR, BMF TV, RMC, Libération, L’Express, Vivendi, Le Figaro, Paris Match, Le Journal du Dimanche, en un mot, le monde médiatico-financier dans son entier a sonné le branle-bas de combat contre Marine Le Pen. Sa politique en faveur des nantis sera pire que celle de son prédécesseur. Petit détail : son épouse est habillée par Vuitton et C°. Pas très popu : plutôt élitaire n’est-ce-pas? Encore un argument pour le moulin « anti-globaliste » et « anti-élite ».
Si 20 millions de Français(es) se sont exprimés pour le poulain des médias et de la finance, 3 millions ont voté blanc et 1 million de personnes ont voté nul, refusant de choisir entre la peste et le choléra. La confiance de la population en Macron n’est certainement pas totale. Parmi les ouvriers 56% et parmi les employés 46% ont voté pour Le Pen. C’est un signe inquiétant. Les valeurs (plutôt mythiques) républicaines se dissolvent : où sont la tolérance, l’accueil des réfugiés politiques et autres, la laïcité bourgeoise, en un mot ce modèle universel républicain et démocratique dont se targue l’esprit Français ? Le Front national a toujours de l’avenir devant lui, avec ou sans Marine.
Selon le nouveau président, le monde et l’Europe ont besoin de la France. Il se prend pour qui ?
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