L’élection de Donald Trump à la Maison Blanche ne doit pas être normalisée. Si le personnage a pu susciter des moqueries pendant la campagne, d’autres jugent qu’il n’est finalement pas si dangereux que cela, voire pire, se réjouissent de sa victoire au nom de la lutte contre l’establishment, dont Trump est l’incarnation, ou au nom de la politique du pire « après Trump, c’est nous ».
Or il n’y a aucun automatisme en la matière. Il est certain que Trump et son équipe de multimilliardaires réactionnaires constitue un ennemi politique dont la victoire imprévue a donné un coup de boost aux violences racistes et sexistes, et ouvre de belles opportunités pour les firmes de l’industrie pétrolière, carcérale et d’armement, comme pour nombre de régimes capitalistes dictatoriaux, Poutine, Erdogan et Assad en tête. Si nous devons refuser le diktat du moindre mal centriste-libéral, qui déroule le tapis rouge pour tous les Trump de ce monde, il est pourtant nécessaire de préparer dès aujourd’hui une résistance acharnée face à Trump et au tournant de plus en plus autoritaire et raciste du capitalisme mondial.
Deux appels, l’un féministe, l’autre écosocialiste, ont convergé pour un rassemblement commun le 20 janvier place de la Monnaie. La LCR appelle à participer à ce rassemblement et soutient l’élargissement de celui-ci à tous les secteurs exploités et opprimés de la société, notamment les racisé.e.s, les sans-papiers, et les LGBTQIA+. Nous publions donc sur notre site le texte de mobilisation de Feminisme-Yeah ainsi que l’appel écosocialiste paru dans le Vif et signé par plusieurs de nos camarades. LCR-web
En plus d’être raciste, homophobe, sexiste et islamophobe, en plus de préparer une nouvelle vague de régression sociale contre le monde du travail, Donald Trump est un climato-négationniste.
Durant la campagne électorale, le nouveau président des États-Unis a affirmé que le changement climatique est un canular inventé par « les Chinois » qui complotent perfidement pour ruiner l’industrie US. Qu’il se dise maintenant « ouvert » à la possibilité d’un lien entre les activités humaines et le réchauffement ne doit pas nous endormir. Cette inflexion dans ses propos n’est pas du tout confirmée par le choix de ses collaborateurs, comme la désignation d’un climato-négationniste à la tête de l’Agence Américaine de Protection de l’Environnement. L’expertise scientifique bâtie sur le savoir, les milliers de pages de rapports rigoureux soumis à la révision par les pairs, la confirmation par les faits observés : tout cela n’a aucune valeur aux yeux de M. Trump. Il veut supprimer les fonds attribués à la NASA pour la recherche sur le réchauffement. Surtout, le nouveau locataire de la Maison Blanche semble bien décidé à abroger en priorité les mesures limitées que son prédécesseur avait prises pour réduire la part du charbon dans l’économie étasunienne. Bien entendu, il n’est pas imaginable d’attendre de son administration le moindre frein aux nouvelles extractions, de gaz ou pétrole de schiste par exemple.
Si Trump concrétise ses intentions, lui et son équipe devront être considérés comme coupables d’un crime planétaire contre l’humanité
L’ère Trump pourrait faire perdre au moins 4 années supplémentaires dans la lutte pour le climat. Pourtant, le verdict posé par des milliers de chercheurs est sans appel : il n’y a plus une minute à perdre pour tenter d’éviter un basculement brutal et irréversible. Les conséquences seraient tellement catastrophiques qu’elles dépassent l’imagination – non seulement à long terme mais aussi dans les prochaines années. En plus des impacts écologiques, des centaines de millions de gens sont menacés, notamment par la hausse du niveau des océans, la baisse de la productivité agricole, les sécheresses, les inondations et autres phénomènes météorologiques extrêmes. Où iront les hommes et les femmes frappées par ces catastrophes? Grossir les rangs des personnes déplacées et réfugiées que les pays riches refoulent sans pitié. Le tournant climato-négationniste a toutes les chances de faire plonger le monde de nos enfants dans la barbarie. Il faut donc le dire sans ambages : si Trump concrétise ses intentions, lui et son équipe devront être considérés comme coupables d’un crime planétaire contre l’humanité, contre l’environnement et contre la raison. Circonstance aggravante, ce crime aura été commis par le chef du pays qui est le principal responsable historique du changement climatique, contre celles et ceux qui en sont les moins responsables.
Nous savons que l’accord de Paris n’est qu’une déclaration d’intentions, notoirement insuffisante pour maintenir la hausse de la température de la Terre au-dessous de l’objectif adopté de 1,5°C. Nous savons que les seuls engagements concrets à ce jour – les contributions nationalement déterminées des 192 États qui ont approuvé les conclusions de la COP21 – nous mettent sur la voie d’un réchauffement probablement bien supérieur à 3°C d’ici la fin du siècle, avec des émissions qui poursuivent leur courbe ascendante alors qu’elles devraient décroître ! Nous ne pensons pas que les révisions périodiques prévues dans l’accord permettront de combler le fossé entre les intentions contenues dans l’accord et la réalité des contributions nationales. Non seulement parce que le temps presse plus que jamais, mais aussi parce que la politique climatique est néolibérale, taillée sur mesure pour et par les multinationales, et que sa mise en oeuvre est laissée à un marché incontrôlé, inefficace et structurellement pervers. Or, c’est précisément la concurrence pour le profit et la croissance qui en découle qui sont les causes fondamentales de l’accumulation de gaz à effet de serre. Nous le disons avec force : pour sauver le climat, il faut sortir de l’idéologie obsessionnelle du marché, changer de système, produire moins, produire pour les besoins, et partager plus. Partager les savoirs et les moyens, les ressources et les espaces. Décentraliser et relocaliser la production, d’énergie et alimentaire notamment, en favorisant son appropriation commune par les citoyens et les petits producteurs.
Aujourd’hui, il est encore possible d’éviter le pire. En s’appuyant sur la décision de principe adoptée à Paris de limiter le réchauffement bien au-dessous de 2°C, voire de 1,5°C, il est encore possible de faire avancer des alternatives à la hauteur du défi, des alternatives ancrées dans des luttes solidaires en faveur du mieux-être, du mieux-vivre, de l’égalité des droits et de la gestion prudente de la planète. Si l’on parvient à empêcher Donald Trump de mettre ses projets à exécution. Si l’on parvient à forcer certains gouvernements et l’UE, tentés de revoir leurs objectifs climatiques à la baisse, de les revoir à la hausse. La mobilisation est plus essentielle que jamais. Pour nous et nos enfants, pour notre bien commun la Terre, nous appelons à la mobilisation la plus large et à la solidarité avec les mouvements sociaux aux États-Unis et dans le monde entier. Nous appelons en particulier le mouvement des travailleurs et celui des activistes environnementaux à une lutte conjointe en défense du climat et des conquêtes sociales, contre les nationalismes et pour la solidarité.
Pour le climat, contre Donald Trump et son monde, nous appelons à un rassemblement avec casserolade, place de la Monnaie à Bruxelles, le vendredi 20 janvier de 17 à 19H sur la base suivante:
– Il n’y a pas de planète B
– Non au climato-négationnisme, non à l’obscurantisme
– Libérons-nous des fossiles
– Réduisons davantage les émissions de gaz à effet de serre, pas moins
– Pas de transition énergétique sans justice, pas de justice sans transition
– Produisons moins, pour les besoins, en partageant les ressources et les savoirs
– Travaillons moins pour travailler tous, pour de bons salaires et dans la solidarité
– Changeons le système, pas le climat
Mateo Alaluf (Sociologue), Paulo Charruadas (Historien, ULB), Chloé Deligne (ULB), Thibaut De Meulemeester (Biologiste, Climat et Justice sociale), Pierre Gillis (Physicien, UMons), Jean-Claude Grégoire (Professeur, ULB), Martin Guerard (JOC Mons – Borinage), Christian Kunsch (MOC), Jacinthe Mazzocchetti (Anthropologue, UCL), Pierre Ozer (Géographe, ULg), Bruno Poncelet (essayiste), Raphaël Rastelli (IEB), Isabelle Stengers (Philosophe), Daniel Tanuro (Climat et Justice sociale), Francis Taylor (Climat et Justice sociale), Léo Tubbax (Nucléaire Stop), Grégoire Wallenborn (Climat et Justice sociale).