Sur le site de Sud Info du mardi 15 avril, on peut lire que « 40725 demandeurs d’emploi sont sanctionnés chaque année par l’ONEM. 203620 depuis 2009 »
Ce site met en exergue que les plus souvent pénalisés « sont les chômeurs qui ne se présentent pas chez un employeur ou au FOREM : 56060 wallons depuis 2009. Et 114584 Belges »
Sud Info va jusqu’à affirmer que « les wallons sont nettement plus nombreux à refuser un emploi jugé convenable. Donc, conforme à leurs qualifications, compétences et expériences »
Cet article va encore plus loin en affirmant qu’il « existe d’autres manières, plus insidieuses, de ne pas être engagé. Comme des déclarations ou des comportements qui rendent, en pratique, l’engagement tout à fait impossible. L’exemple classique : un chômeur qui, volontairement, s’emploierait de manière flagrante et impolie à ne pas soigner sa tenue, son aspect physique, ses manières lors d’un entretien d’embauche. En espérant… ne pas être engagé. Et conserver ses allocations de chômage »
LES TRAVAILLEURS SANS EMPLOI SONT CERNES DE TOUTE PART…
Nous savions que les travailleurs sans emploi étaient beaucoup plus sévèrement contrôlés par l’ONEM et le FOREM depuis 2004, mais nous ignorions qu’une certaine presse s’acharnerait d’une façon aussi injurieuse sur eux. A quelques semaines des élections, de quoi faire le jeu de la droite, des partis populistes, qui veulent pour certains, carrément limiter dans le temps toutes les allocations de chômage. De quoi faire le jeu également du PS et du CDH qui sont convaincus qu’il faut maintenir des contrôles qui ont comme conséquences des possibilités d’exclusion à tout moment et qui représentent donc pour les sans-emploi une insécurité sociale permanente. Sans doute que le journaliste qui a écrit les quelques lignes citées plus haut a sa carte au MR ou carrément au Parti Populaire. Ou alors, il pense comme le PS et le CDH qu’il faut maintenir à tout prix un système chômage coercitif pour rassurer les investisseurs privés sur la docilité de nos demandeurs d’emploi à accepter des conditions de travail et de salaire au rabais.
LES PATRONS ET LES POUVOIRS PUBLICS SONT RESPONSABLES DU CHOMAGE…
Depuis 2004, les travailleurs sans emploi doivent faire face tout d’abord au manque d’offres de travail. La toute première réalité qu’il faut rappeler est celle-là. Dans certaines sous régions, par exemple à Bruxelles, en octobre 2013, il n’y avait qu’une offre pour 48 demandeurs d’emploi. En Wallonie, toujours en octobre 2013, pour le FOREM, sur 18 286 offres d’emploi référencées, 7 322 annonces étaient reprises du VDAB et de Actiris. Seules 10 964 étaient propres au FOREM (255 162 demandeurs d’emploi inoccupés). Soit une offre d’emploi « FOREM » pour 23 demandeurs d’emploi wallons (source – site « Solidaire » du ptb)
En examinant ces chiffres, il saute aux yeux que les travailleuses et travailleurs sans emploi ne sont pas responsables du chômage. Ce n’est pas parce que les chômeurs utiliseraient « d’autres manières, plus insidieuses pour ne pas être engagés » que l’emploi ne progresse pas mais plutôt parce que les patrons et les pouvoirs publics ne remplissent pas leur obligation collective d’en créer.
Et si certains demandeurs d’emploi hésitent parfois à accepter une proposition de travail, c’est parce que, bien souvent, celle-ci est précaire. Non seulement, il n’y a pas assez d’offres, mais de plus, celles qui existent sont soit des contrats temps partiels, intérimaires ou en CDD dont beaucoup ne permettent pas de sortir de la précarité.
LE NOMBRE DE TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS PAUVRES A AUGMENTE…
Le 31 janvier 2014, le site de la RTBF affirmait que « le nombre de personnes qui travaillent et reçoivent en même temps un revenu d’intégration en complément, parce que les revenus qu’elles tirent de leur travail sont trop faibles, est en augmentation. Il est passé en dix années de temps de 3 à 6% des bénéficiaires du revenu social d’intégration. Cela représente aujourd’hui près de 6000 personnes, selon les chiffres du SPF Intégration sociale… »
Et d’ajouter : « Parmi ces près de 6000 « TRAVAILLEURS PAUVRES », les femmes sont majoritaires et près de la moitié d’entre elles ont des enfants. Les emplois de ces travailleurs se retrouvent presque tous dans le secteur privé, souvent dans le secteur intérimaire, l’horeca, le petit commerce, le nettoyage ou le secteur socio-culturel… »
LE GOUVERNEMENT WALLON PRATIQUE AUSSI LA CHASSE AUX CHOMEUSES ET CHOMEURS…
Si les chiffres de sanctions sont aussi élevés en Wallonie c’est parce que le gouvernement wallon pratique également depuis 2004, à l’instar du gouvernement fédéral, la chasse aux chômeurs plutôt que la chasse au chômage.
En Wallonie, effectivement, le nombre de sanctions suite à une non présentation aux convocations du FOREM ou à une soi-disant non réponse à une offre d’emploi, a fortement augmenté depuis 2004.
Mais cela est-il dû au travailleur sans emploi ou aux systèmes de contrôles mis en place depuis les accords de coopération de 2004 ?
A notre sens, le gouvernement wallon a lui aussi, pris des décisions qui ont fait entrer le FOREM dans une politique d’accompagnement des sans-emploi basée sur la coercition. Dans un tel contexte, le point de vue du chômeur, ainsi que ses difficultés, ne sont plus que rarement pris en compte. Dès lors qu’il ne répond pas à ce qui est considéré maintenant comme ses obligations, même dans le cadre des politiques d’accompagnement, il risque au minimum une suspension des allocations de chômage.
SYSTEMATISATION DES DONNEES DU FOREM VERS L’ONEM…
Dès qu’un demandeur d’emploi ne répond pas à deux convocations du FOREM (la seconde étant un recommandé), il y a transmission du service public régional de l’emploi vers l’ONEM. Même chose en cas de non renvoi du talon réponse qui atteste du fait que le travailleur sans emploi a bien répondu à une offre qui lui a été proposée ou plutôt imposée par le FOREM. Cette transmission a été systématisée et les sans-emploi se trouvent confrontés à des pratiques expéditives et essentiellement administratives.
Même si la personne n’a pas reçu l’offre d’emploi ou la convocation, même si elle est devenue sans abri, même s’il s’agit d’une femme qui a dû fuir de chez elle à cause de violences conjugales ou même si la personne concernée ne sait pas lire ou écrire, le FOREM ne prendra pas forcément des dispositions pour examiner si le demandeur d’emploi était en capacité de répondre. Et dès que l’info est transmise par le FOREM à l’ONEM, le chômeur est en danger d’une suspension qui peut aller de 4 à 52 semaines. Les seules personnes un peu protégées sont celles qui sont suivies par le service social du FOREM. Pour celles-là, il y aurait plus de souplesse et pas nécessairement de transmission immédiate au bout de deux absences à une convocation. Mais, rien ne peut affirmer que tous les demandeurs d’emploi en grande difficulté sociale sont suivis par les assistants sociaux du service régional de l’emploi. Dès lors, beaucoup de personnes très fragilisées ont, depuis 2004, été sanctionnées pour avoir soi-disant « refusé un emploi convenable » parce qu’elles n’étaient pas en capacité de le faire et non pas parce qu’elles se seraient mises dans les conditions pour ne pas être engagées.
Selon nous, les sanctions ont fortement augmenté à cause des décisions politiques qui ont durci les conditions de l’accompagnement et certainement pas à cause du manque de participation des chômeurs à la recherche emploi ou aux propositions faites par le FOREM.
Il faut savoir également qu’à partir du moment où l’info est transmise à l’ONEM, ce sera au chômeur de prouver les problèmes auxquels il a été confronté et qui ont empêché qu’il puisse se manifester auprès du FOREM ou d’un employeur. Même s’il n’a pas reçu réellement la convocation du FOREM, le chômeur devra en apporter les preuves pour échapper à la sanction. Bien souvent, même quand elle est en tort, la Poste ne le reconnait pas et c’est le demandeur d’emploi qui écope.
Il arrive que le demandeur d’emploi envoie sa candidature à l’employeur en oubliant de retourner le talon réponse au FOREM. Mais si l’ONEM, après la transmission d’info, en cours d’examen du litige, vérifie auprès de cet employeur, rien ne dit que ce dernier possède encore le CV ou qu’il prendra la peine de faire une recherche pour vérifier s’il est bien possession des documents de candidature. Toute vérification auprès d’un employeur est aléatoire et tourne très fréquemment au désavantage du chômeur.
Ce n’est pas le chômeur qu’il faut mettre en cause mais le caractère systématique et administratif des transmissions des données du FOREM vers l’ONEM. Nous demandons donc la suppression du caractère systématique de la transmission des données du FOREM vers l’ONEM qui place les chômeurs et les chômeuses les plus fragilisé-e-s socialement en situation d’exclusion à l’ONEM.
EMPLOI CONVENABLE : TOUJOURS CONFORME AUX COMPETENCES DES CHOMEURS ? RIEN N’EST MOINS SUR…
Le journaliste de Sudinfo est mal informé. Il devrait savoir qu’au bout de trois mois de chômage, le demandeur d’emploi est obligé de diversifier sa recherche dans d’autres domaines que sa qualification principale. Contrairement à ce que cet article du 15 avril veut faire passer comme message, nous pouvons affirmer que la grosse majorité des chômeuses et chômeurs cherchent du travail dans plusieurs métiers. Il suffit de suivre les entretiens de contrôle à l’ONEM pour s’en rendre compte.
Cette obligation de diversifier veut tout simplement dire le contraire que ce qui est affirmé par ce journaliste. En effet, elle peut produire des situations où l’emploi soi-disant convenable proposé peut ne pas correspondre aux compétences du travailleur sans emploi, qui aura été forcé d’élargir sa recherche dans un métier qui ne lui convient pas. Il y a d’ailleurs des conflits qui peuvent survenir entre le chômeur et le conseiller FOREM sur cette question quand ils établissent le plan d’actions obligatoire. Pas rigolo que l’on vous impose d’aller nettoyer chez des particuliers alors que votre expérience et vos compétences sont plutôt liées à un autre domaine. Pas marrant que l’on vous oblige de suivre une formation en vente alors que vous ne vous sentez aucune affinité pour ce métier. Et je pourrais citer encore beaucoup d’autres exemples qui prouvent que les offres d’emploi soi-disant convenables imposées aux chômeurs et chômeuses peuvent être en dehors de leurs compétences et de leurs désirs.
La réalité est que la notion d’emploi convenable a largement évolué depuis plusieurs années. Les conditions qui définissent un emploi convenable sont plus contraignantes. A part le fait qu’il faut élargir sa recherche au bout de trois mois de chômage, signalons que l’on doit accepter une proposition de contrat de travail à 60 kms de chez soi et ceci quel que soit le temps de déplacement. Notons qu’emploi convenable ne veut plus dire depuis longtemps un contrat à temps plein ou ½ temps. Dans certaines conditions, une proposition de travail à temps partiel de 13 heures/semaine pourra être considérée comme non refusable. Le durcissement des conditions de l’emploi convenable sont des décisions du gouvernement fédéral. Mais, elles s’intègrent bien avec les dispositions prises par le gouvernement wallon pour la mise en place de l’accompagnement individualisé des chômeurs qui est d’application depuis 2010.
UN PLAN D’ACTIONS OBLIGATOIRE POUR CHAQUE CHOMEUSE ET CHAQUE CHOMEUR…
Depuis 2010, chaque demandeur d’emploi signe un plan d’actions obligatoire avec son conseiller référent au FOREM. Un refus de signer serait transmis à l’ONEM et signifierait l’exclusion du droit aux allocations de chômage. Dans ces plans d’actions, se trouvent indiquées les démarches à faire sur une période de trois ou six mois et dont la réalisation est évaluée régulièrement. Ces plans d’actions sont en fait des contrats que le demandeur d’emploi a intérêt à respecter s’il veut éviter une transmission à l’ONEM qui pourrait lui coûter quelques mois de suspension ou l’exclusion.
Il y a un lien entre cet accompagnement coercitif et les mesures fédérales qui imposent qu’un chômeur est obligé de diversifier sa recherche et d’accepter une proposition d’emploi à 60 kms de chez lui. Le plan d’actions obligatoire peut en effet imposer au travailleur sans emploi des orientations professionnelles avec lesquelles il ne serait pas tout à fait d’accord puisque la législation fédérale impose d’aller vers d’autres métiers que ceux liés à l’expérience professionnelle principale ou à la qualification première.
Ces plans d’actions imposés par le service public régional de l’emploi depuis 2010 constituent en fait une généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage. Dans les faits, cette contractualisation, comme celle appliquée par le contrôle sur les recherches emploi de l’ONEM, indique que l’accès aux allocations de chômage n’est plus un droit en tant que tel.
La contractualisation ajoute tellement de conditions subjectives que le chômeur doit tout le temps faire la preuve qu’il mérite ses allocations de chômage. Dès lors, la protection sociale de toute personne sans emploi est devenue complètement aléatoire. S’il est jugé par les institutions qui s’occupent de l’accompagnement et du suivi (FOREM et ONEM) qu’il n’a pas respecté ces conditions subjectives fixées dans les contrats, il perdra pour une période ou définitivement le droit aux allocations de chômage.
Pour que la Sécurité Sociale redevienne un rempart sûr contre l’extrême précarité ou carrément la pauvreté, il faut revendiquer le retour à un accompagnement sur base volontaire et sans sanction. Cela demande une lutte contre toute contractualisation du droit aux allocations de chômage. Sur le plan des régions, il faut donc revendiquer la suppression des plans d’actions obligatoires.
« DROIT A LA SECURITE SOCIALE. LA SOLIDARITE N’EST PAS A VENDRE ! (Phrase extraite du programme LCR « nos vies valent plus que leurs profits »)
Le dimanche 11 mai à 14 heures, le réseau bruxellois de collectifs de chômeurs/ses organise une marche « contre les chasses aux chômeurs/ses ». Ce collectif revendique le retrait des mesures anti chômeurs/ses, il se prononce contre les sanctions et les exclusions.
Citons le collectif : « Les gouvernements fédéraux successifs, aidés par les gouvernements régionaux, démolissent l’assurance chômage : sanctions, suspensions, exclusions et réductions d’allocations par milliers. Autant de personnes (et leurs familles) jetées dans la précarité et humiliées. Il s’agit d’une attaque sans précédent contre nos acquis sociaux et nos conditions de travail »… Je soutiens cette manifestation et j’y serai présent. Départ devant l’ONEM de Bruxelles, (Gare du Midi), Place Marcel Broodthaers, 4 à 1060 Bruxelles.
Soyons présentes et présents nombreuses et nombreux à cette manifestation organisée par des « secteurs » de la FGTB, de la CSC et des associations, qui revendiquent notamment le « retrait des mesures anti-chômeurs/ses… »
candidat indépendant-
Soignies-3ième effectif au Parlement Wallon sur la liste PTB-GO