Derrière les diverses propagandes étatiques de « lutte contre le terrorisme », se déploie en Syrie une offensive militaire pro-Assad qui se veut décisive pour mettre fin à l’insurrection populaire. En même temps, le président turc Erdogan tente d’écraser les forces kurdes jusqu’en Syrie. Ces actions de guerre totale sont menées avec la complicité des puissances occidentales, en dépit de quelques condamnations rhétoriques. Et l’opposition syrienne est poussée dans des négociations pour se soumettre aux conditions du régime criminel d’Assad.
Ces dernières semaines, les forces armées du régime d’Assad ont fait des gains sans précédent dans la campagne nord d’Alep et ont encerclé les zones libérées de la ville, divisée entre le régime et divers groupes de l’opposition depuis l’automne 2012.
Le régime d’Assad bien appuyé…
Pour cela, le régime d’Assad a bénéficié des forces du Hezbollah libanais et des milices fondamentalistes chiites dirigées par l’Iran, soutenues par des bombardements massifs de l’aviation russe. Des dizaines de milliers de civils ont fui, cherchant refuge à la frontière turque, ou encore dans la ville de Afrin, dirigée par les forces kurdes du Parti de l’Union démocratique (ou PYD). Les bombardements russes ont également provoqué des destructions massives d’infrastructures civiles comme le dernier grand hôpital situé dans les zones libérées du nord d’Alep. La réponse du président turc Erdogan à cette évolution de la situation a été de maintenir la frontière fermée, puis de bombarder à son tour les villes cette fois sous contrôle du PYD !
Dans les zones libérées d’Alep qui comptent encore environ 350 000 personnes, le conseil populaire local a mis en place un centre de crise pour fournir et préserver les besoins essentiels de nourriture et de carburant. Des manifestations populaires ont eu lieu dans les quartiers libres d’Alep demandant aux factions armées de l’opposition de la province de s’unir autour d’une bannière commune pour une Syrie libre.
Au même moment des dizaines de milliers d’habitants de la ville de Deraa, au sud du pays, fuyaient l’avancée militaire des forces du régime au sol et les bombardements aériens combinés de l’aviation russe et du régime. L’un des hôpitaux de Médecins sans frontières (MSF) dans la province de Deraa a été bombardé le 9 février. Cette intervention russe qui a très peu ciblé Daesh, a en revanche été déterminante dans la progression des forces du régime d’Assad contre tous les autres opposants, et dans le désespoir qui pousse la population sur les routes. Il faut avoir l’aveuglement du journal l’Humanité pour considérer que l’intervention russe dans la situation est positive !
Genève III, Munich… pousser les Syriens à se mettre à genoux !
Comme les précédentes, la Conférence de Genève III en novembre a été un échec. Les forces armées du régime et ses alliés ont poursuivi leurs offensives militaires, poussant la Haute Commission de Négociations de l’opposition syrienne, mise en place à Ryad en décembre 2015, à se retirer des négociations. L’envoyé spécial de l’ONU, M. de Mistura, a fixé une nouvelle date pour le 25 février afin de réunir pour de nouveaux pourparlers entre le régime syrien et l’opposition à Genève.
Entre-temps, Russes et Américains se sont congratulés d’avoir conclu le 12 février à Munich un accord pour un cessez-le-feu… qui devait être effectif au bout d’une semaine. Il serait alors seulement envisagé de fournir un accès humanitaire aux villes syriennes assiégées. Mais le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a aussitôt ajouté que la cessation des hostilités ne s’applique pas à Daesh et Jabhat al-Nusra, garantissant ainsi que la guerre continuera.
Avec le peuple syrien, contre toutes les formes de contre-révolution
De nombreux régimes autoritaires et coloniaux ont utilisé ce même genre de technique pour réprimer les mouvements populaires contre leurs pouvoirs, favorisant sciemment les groupes les plus fanatiques et réactionnaires pour gagner le soutien des grandes puissances. Il est ainsi désolant que de nombreux anticolonialistes ne voient pas en Syrie la symétrie avec l’attitude des puissances impérialistes par rapport au peuple palestinien confronté au jusqu’auboutisme des gouvernements israéliens de ces dernières années : une violence écrasante de l’Etat contre la population révoltée en prétextant que celle-ci se serait soumise aux islamistes et aux terroristes ; des puissances qui condamnent pour la forme les bombardements… puis qui rendent responsable de la poursuite de la guerre le peuple s’il ne renonce pas à toutes ses revendications, tout en refusant l’asile aux réfugiés !
Malgré leur rivalité, les interventions des États impérialistes et puissances régionales partagent un objectif commun : liquider le mouvement populaire révolutionnaire en Syrie commencé en mars 2011, et essayer de vaincre militairement Daesh.
Les progressistes et démocrates se doivent de condamner tous les projets impérialistes qui ont pour objectif de mettre un terme à la révolte populaire syrienne. En même temps, il nous faut nous opposer aux interventions des monarchies du Golfe et de la Turquie, qui avancent leurs propres intérêts politiques et veulent changer la nature de la révolution en une guerre confessionnelle, tout comme Assad et ses alliés.
Nous devons soutenir les demandes cruciales du peuple syrien, qui sont la fin des bombardements, la fin des blocus, la libération des prisonniers politiques et le retour des réfugiés et des populations déplacées internes. Nous devons soutenir ces poches d’espoir existant encore en Syrie et composées de divers groupes et mouvements démocratiques et progressistes opposés à toutes les formes de la contre-révolution, le régime d’Assad et ses alliés ainsi que les groupes fondamentalistes islamiques.
Source : NPA