Les discussions de « Genève IV » sur l’avenir de la Syrie se sont achevées en fin de semaine passée avec peu d’avancées concrètes, pendant que sur le terrain les affrontements continuent…
Ces « négociations de paix » sous l’égide de l’ONU ont mis face-à-face le régime et différents acteurs de l’opposition : le Haut Comité des négociations (HCN), principale délégation de l’opposition, et des opposants proches de la Russie, le « Groupe du Caire » et le « Groupe de Moscou ». Une fois réaffirmées les divergences de fond, les discussions se sont conclues le 3 mars avec l’acceptation d’un « agenda clair » incluant quatre points : la lutte contre le terrorisme, la gouvernance – thème flou pour évoquer une transition politique –, la Constitution et les élections. L’ONU prévoit un nouveau rendez-vous en mars.
Parallèlement, mardi 28 février, la Russie et la Chine ont mis à l’ONU leur veto à des sanctions contre le régime Assad pour l’utilisation d’armes chimiques. C’est la septième fois que Poutine utilise son veto pour protéger le régime de Bachar el-Assad, rejoint par la Chine pour bloquer six de ces sept résolutions. La nouvelle proposition de sanctions suivait une enquête conjointe menée par les Nations unies et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), qui avait conclu en octobre que le régime syrien avait mené au moins trois attaques avec des armes chimiques en 2014 et 2015. Les enquêteurs ont déterminé que les djihadistes du groupe État islamique (EI) avaient eux aussi utilisé du gaz moutarde en 2015.
Bombardements et attentats…
Sur le terrain, le cessez-le-feu négocié le 30 décembre est quotidiennement violé, notamment par les bombardements de l’aviation du régime Assad et de son allié russe contre des régions où sont absents les djihadistes de l’EI et de Fateh al-Sham (initialement al-Qaïda en Syrie). Ils touchent particulièrement les civils. Les forces pro-régime continuent par exemple les avancées militaires et les bombardements sur la ville de Deraa.
En même temps, Fateh al-Sham a revendiqué des attentats de kamikazes à Homs le samedi 25 février contre les services de renseignement du régime, faisant une quarantaine de morts dont Hassan Daaboul, le chef du renseignement militaire de Homs, un proche du dictateur Bachar el-Assad. En réponse, il y a eu une intensification des bombardements par les forces du régime contre le quartier assiégé d’al-Waer à Homs, aux mains de l’opposition.
Ces attaques se sont produites au lendemain d’un autre jour sanglant en Syrie, où des attentats revendiqués par l’EI contre des forces de l’Armée syrienne libre (ASL) ont fait 83 morts, dont 45 civils, près d’Al-Bab dans le nord du pays.
Plus récemment, dimanche 5 mars, l’EI a également perpétré deux attentats suicides dans la province d’Alep, tuant huit soldats du régime près de la localité de Deir Hafer et sept combattants de l’opposition armée à Azaz.
Les forces de Damas ont repris la ville de Palmyre à l’EI, tandis qu’au moins 60 000 civils dans le nord de la Syrie ont fui les combats, marquant la double offensive, d’une part, des forces turques alliées à certains groupes de l’opposition armée et, d’autre part, des troupes du régime syrien appuyées par la Russie, chacune contre l’EI… mais en concurrence entre elles.
Des forces démocratiques toujours présentes
Malgré une situation toujours plus chaotique, des résistances civiles et démocratiques se poursuivent à la fois contre le régime et les forces fondamentalistes religieuses. Dans la campagne d’Alep, la population de la ville d’Atareb s’oppose depuis plusieurs semaines aux pratiques autoritaires de la nouvelle coalition « Hay’at Tahrir a-Sham » (HTS), dominée par les djihadistes de Fateh al-Sham. Des manifestations ont notamment eu lieu pour dénoncer les attaques du HTS contre le quartier général d’un groupe local de l’Armée syrienne libre (ASL), ou contre les tentatives djihadistes de prendre le contrôle de la boulangerie de la ville.
De même, des conseils locaux sont toujours actifs. Au mois de janvier, des élections ont d’ailleurs eu lieu pour élire le conseil local d’Idlib. Il reste encore environ 300 conseils locaux dans les régions libérées, tandis qu’il en existait plus de 700 au début de l’année 2013.
Cela démontre à nouveau que malgré la domination croissante de groupes militaires réactionnaires, les forces démocratiques civiles sont toujours présentes et actives, défiant les autorités lorsque les combats et les bombardements du régime et de son allié russe cessent. C’est pourquoi il est important de mettre un terme à la guerre qui ne profite qu’aux deux acteurs de la contre-révolution – le régime et les forces fondamentalistes réactionnaires – tout en refusant toute relégitimation sur la scène internationale d’Assad et de ses associés.
Source : NPA