Le gouvernement AKP mène une guerre sanglante contre les femmes en Turquie. Toutes les formes de violences contre les femmes ont augmenté de 1 400 % depuis que l’AKP est arrivé au pouvoir en 2002.
Au moins trois femmes sont tuées par jour (5 406 femmes ont été tuées entre 2002 et 2015), la plupart par leur mari ou ex-mari à cause de demandes de divorce. La seule chose que le gouvernement a fait contre le féminicide ou la violence a été de promulguer des lois qui renforcent la famille, rendent le divorce plus difficile, et affaiblissent la situation des femmes. Et la justice couvre le meurtre de femmes en toute impunité.
En 2011, l’AKP a transformé le ministère des Femmes et de la famille en ministère de la Famille. Du droit des femmes, ils sont passés à la protection de la famille et des femmes comme groupe vulnérable. Bien que qu’ils aient tenté de rendre illégal l’avortement, ils ne pouvaient pas l’interdire à cause de l’opinion publique. Après que Erdogan a déclaré en 2002 que « l’avortement c’est le génocide » et que « le contrôle des naissances ne peut pas être compatible avec la structure de la famille musulmane », l’avortement et les contraceptifs sont devenus presque inaccessibles, car dans beaucoup d’hôpitaux publics, les médecins refusent l’avortement ou la contraception à cause de la pression du gouvernement.
Cette politique correspond à leur projet de société qui fait porter le poids du travail et des responsabilités domestiques totalement sur les femmes et qui les considère comme des êtres humains précieux à condition qu’elles donnent naissance à des enfants. Récemment, Erdogan, qui incite souvent les gens à avoir au moins trois enfants, a prétendu que les femmes qui préfèrent ne pas avoir d’enfants ou ne pas gérer leur foyer, seraient « déficientes »…
Plus autoritaire, plus patriarcal…
En mai 2016, une commission parlementaire a proposé une série de mesures qui bloqueraient les démarches des femmes qui cherchent à mettre fin à un mariage, même quand elles sont exposées à la violence. Le rapport recommande des séances obligatoires avec un intermédiaire professionnel dans les cas de violences domestiques ou de divorce, exige des audiences à huis clos afin de « protéger l’intimité de la famille » (ce qui empêcherait les militantes féministes d’être présentes au tribunal) et propose d’introduire une limitation dans le temps pour la pension alimentaire. Le rapport recommande que des conseillers religieux interviennent dans les affaires de divorce afin de réconcilier les couples…
Problème pourtant très grave en Turquie, l’attitude à la fois du gouvernement et des médias à l’égard de l’abus des enfants a été de dissimuler les faits et d’individualiser les problèmes en n’inculpant que des individus présentés comme des « pervers ». Après la révélation récente d’une affaire où des enfants avaient été violés pendant des années dans une école gérée par une fondation islamiste pro-gouvernementale, le gouvernement a nié la responsabilité de l’État et le ministre de la famille a déclaré : « Un seul incident ne devrait pas servir de prétexte pour dénigrer une institution qui est connue pour ses services »…
Selon le rapport de la commission parlementaire sur le divorce, l’âge légal du mariage, actuellement 18 ans, devrait passer à 15 ans, et si des mineures de moins de 15 ans ont des rapports sexuels avec des adultes et décident de se marier, alors il n’y aura aucune accusation de pédophilie.
Le gouvernement dirigé par Erdogan a entrepris de nombreuses démarches pour changer l’État et la société dans un sens plus autoritaire et patriarcal. Pour eux, l’oppression des femmes et leur relégation à des rôles de genre traditionnels, en plus de leur exploitation au travail, sont une condition nécessaire pour la naturalisation d’autres formes d’inégalités. Si les suggestions de la « commission sur le divorce » sont adoptées, les femmes et les enfants perdront beaucoup de droits concrets, et avec eux, toutes les personnes opprimées. Le danger est grand.
D’Istanbul, la commission femmes de Yeniyol (Traduction de Ross Harrold)
Source : NPA